• CARTE SCOLAIRE : redonner une légitimité à une carte scolaire rénovée !

    L'avant-campagne présidentielle s'est emparée de la question de la carte scolaire. Nicolas SARKOZY a tout bonnement proposé sa suppression pure et simple. Ségolène ROYAL a évoqué son aménagement ou son assouplissement. Les débats qui s'organisent autour de ces prises de position mêlent souvent la pure tactique, le double langage et la mauvaise foi. Il est utile d'y voir clair.
    La carte scolaire date de 1963 : elle a été mise en place en même temps que la création des collèges d'enseignement secondaire (les CES). Il s'agit de la fixation d'un périmètre à l'intérieur duquel toutes les familles qui résident doivent envoyer leurs enfants dans un établissement scolaire donné.
    Si la question est aujourd'hui posée, c'est pour au moins deux raisons, l'une liée aux pratiques personnelles et familiales des couches moyennes supérieures, l'autre résultant d'une analyse lucide de la réalité. Pour la première, il est clair que les couches moyennes supérieures ont engagé depuis longtemps la course au contournement de la carte scolaire. La prise de position contre la carte scolaire est donc une forme d'autojustification. Quant à la seconde, il est clair que, dans sa forme actuelle, elle a sans doute épuisé sa capacité de lutte contre les inégalités. En effet, la constitution de ghettos urbains conduit à enfermer dans certains établissements les enfants des classes populaires, notamment issues de l'immigration, qui deviennent des établissements « déclassés ».
    Les « zones d'éducation prioritaire » mises en place en 1982 visaient à tenir compte de cette réalité en affectant des moyens supplémentaires dans les établissements qui y sont situés. Mais force est de constater que, si certains établissements ont pu ainsi se redresser, ce n'est pas le cas partout. Et, en tout état de cause, les ZEP tenaient compte des inégalités entre établissements plus qu'elles ne les combattaient.
    La suppression pure et simple est une mesure d'inspiration « ultra-libérale », qui vise, au nom des limites de cette politique, à redonner bonne conscience à chacun et à laisser chacun, en fonction de ses moyens et de ses relations, trouver les « bons établissements » pour ses enfants. Elle doit être combattue.
    <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p> </o:p>C'est à son aménagement qu'il faut se consacrer, par une politique de requalification des établissements déclassés. Plusieurs pistes peuvent être explorées.
    <o:p> </o:p>1 - L'affectation des bons élèves des classes populaires dans des établissements qui constituent des filières de réussite est possible grâce au développement des internats, qui est absolument nécessaire.
    <o:p> </o:p>2 - Il est nécessaire de mettre en œuvre la proposition de Patrick Weil qui consiste à décider l'affectation d'un pourcentage fixe des meilleurs élèves de chaque établissement (par exemple, 5%) dans les filières sélectives de l'enseignement supérieur. L'accès aux classes préparatoires aux grandes écoles, par exemple, serait ouvert à autant d'élèves du lycée de Calais ou d'Aubervilliers que des grands lycées réputés. C'est un moyen de redonner de l'attractivité à tous les établissements.
    <o:p> </o:p>3 - Une politique volontariste de répartition des options « rares » en direction des collèges et des lycées situés en ZEP serait aussi de nature aussi à redonner de l'attractivité à ces établissements.
    <o:p> </o:p>4 - Il pourrait aussi être envisagé un système de double affectation, en tablant d'abord sur le volontariat, de professeurs affectés dans des collèges de centre-ville ou dans des « grands lycées », qui pourraient effectuer une partie de leur service dans un établissement situé en ZEP, tout en restant titulaires de leur poste.

    5 - Il  pourrait être expérimenté dans une académie une forme de « busing » à la française. Il est rappelé que le busing désigne, dans certains Etats américains, la politique qui consiste, de façon volontariste, à transporter les élèves pour assurer la « mixité sociale » (et, en l'occurrence, aux Etats-Unis, la mixité raciale) des différents établissements. Mais les conditions de réussite d'une telle expérience doivent être soigneusement réunies.



    Ces mesures, qui peuvent être discutées, pourraient être de nature, avec d'autres (ce n'est pas exhaustif), à  Il faut placer les parents dans une autre situation que celle d'éviter les mauvais établissements et de rechercher par la débrouille ceux qui sont supposés les meilleurs. C'est la qualité de l'enseignement dans son ensemble qu'il faut reprendre.



    Patrick Quinqueton


  • Commentaires

    1
    Mercredi 20 Septembre 2006 à 19:03
    Carte scolaire en cause ...
    Je trouve que dans la partie analytique du texte, on a un raccourci un peu rapide: "les couches moyennes supérieures ont engagé depuis longtemps la course au contournement de la carte scolaire"... et on a oublié le role que joue la carte scolaire dans la constitution de ghettos urbains (flambée de l'immobilier dans les zones de "bonne" carte scolaire, fuite des classes moyennes quand c'est possible des "mauvaises", c'st une question et ou un argament qu'on entend souvent dans les agences immobilières) Moi je veux bien, mais je n'appartiens pas aux couches moyennes supérieures (plutot moyennes inférieures, et je suis un foyer monoparental). mon fils a des camarades de classe dont la mère fait des ménages pour trouver le supplément budgétaire qui finance leur lycée (privé sous contrat). Et enfin de plus en plus d'enfants d'immigrés fréquentent les établissements privés (jusqu'à 50% d'une classe et c'est une phénomène en progression depuis quelques années). Petit détail: j'ai du me résoudre malgré mes convictions iniitales à inscrire mon fils dans un lycée privé sous contrat car à l'occasion d'une réorientation, il devait changer de lycée. Or l'éducation nationale n'a pas respecté la carte scolaire qu'elle prétend faire respecter aux parents et voulait "boucher les trous" dans un lycée hors zone normale d'affectation (la fiche de voeux comportait outre les 3 lycées de la carte scolaire 2 autres établissements un peu plus éloignés mais restant proches). Ca revenait à échanger un temps de transport AR de 1h10 à près de 2 heures! pendant ce temps là des dérogations ont été accordées à des gens qui ne relevaient pas de cette zone de la carte scolaire. Donc à performances au bac similaires entre les deux établissements, j'ai logiquement choisi le lycée sous contrat... voilà pourquoi, je ne me battrai pas à outrance pour défendre le système actuel qui a démontré à tant d'égards qu'il était à géométrie variable et qui organise avec efficacité un transfert vers le secteur privé, par manque de rigueur, de crédibilité et d'efficacité. Plutot que l'assignation à résidence pour les enfants de ceux qui ne peuvent pas faire autrement (s'offrir une adresse dans les "bons" quartiers , ou financer un établissement privé), effectivement pour un certain nombre d'élèves c'est la "désassignation" qui est un meilleur choix (busing, options rares). Les propositions exposées vont donc dans le bon sens. Éric
    2
    Vendredi 22 Septembre 2006 à 18:28
    Très bonne analyse
    Très bonne analyse. Quelques propositions un peu discutables. La dernière phrase me paraît la plus importante. C'est la qualité de l'enseignement qui permettra à une réforme telle que celle proposée de réussir. Une grande partie de l'évitement scolaire (pas uniquement par les couches moyennes supérieures, mais aussi par des gens modestes) est due à la piètre qualité de l'enseignement dans les ZEP notamment. Et ce terme ZEP, quel terme de relégation !!! Christophe MEZERETTE
    3
    Vendredi 22 Septembre 2006 à 21:02
    Globalement d'accord
    Je suis globalement en accord avec le refus de supprimer la carte scolaire , qui ne ferait qu'aggraver les inégalités sociales et culturelles Mais les "solutions" aménagements me laissent rêveuse, pour ne pas dire insatisfaite Il faut globalement dire que le problème n'est pas dans la carte scolaire , mais dans 2 autres "causes" en amont - le problème du logement - le problème de la réunification du niveau de travail et d'exigences dans les écoles de France : tant que certains établissements continueront à ne pas assurer (dans beaucoup de cas ne pas pouvoir assurer) un enseignement de même niveau qu'ailleurs , il y aura des stratégies de détournement de la part des classes moyennes et l'écart sera croissant Enfin , les propositions 2 et 5 me laissent perplexes : on est limite discrimination positive ; il faut favoriser par tous les moyens l'accès des plus défavorisés aux "classes d'élite" mais pas au moyen de proportions fixées au préalable Quand à forcer à la mixité sociale de cette façon (point5), on revient aux plus sombres jours du stalinisme et les classes très favorisées échapperont à tout çà. Voilà quelques réflexions à chaud J'espère que le parti permettra à ses militants de débattre Bien cordialement Christine
    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :